Avant-Première : projection de "Fahavalo Madagascar 1947" de Marie-Clémence Andriamonta-Paes, en sa présence, le 29 novembre à 20h30 au Lido
Article mis en ligne le 9 novembre 2018
dernière modification le 13 novembre 2018

par Webmestre

Chef opérateur : Cesar Paes musique : Régis Gizavo

Documentaire 90 mn Sortie en France : 30 janvier 2019 VO Malgache, Français

Synopsis :

A Madagascar en 1947, les rebelles insurgés contre le système colonial sont appelés fahavalo, « ennemis » de la France. Les derniers témoins évoquent leurs longs mois de résistance dans la forêt, armés seulement de sagaies et de talismans.
La grande histoire de l’insurrection de 1947 est racontée par ceux qui ont été témoins des évènements. Des soldats rebelles, des mères de famille, qui ont gardé en mémoire des faits précis qui continuent de les hanter. Parfois aussi les voix de certains protagonistes ont été enregistrées par la radio et viennent tout comme la musique de Régis Gizavo, apporter un contrepoint aux images d’archives inédites photographiées et filmées dans les années 40 à Madagascar. Ce voyage dans le passé est éclairé par les séquences filmées aujourd’hui dans les villages où se sont déroulés les faits, le long des lignes de chemins de fer qui traversent la forêt, des Hauts Plateaux vers la côte est de Madagascar.

Pourquoi ce film : par MARIE-CLEMENCE ANDRIAMONTA-PAES :

« La rébellion malgache de 1947 est une histoire dont on ne parle pas ou si peu. C’est un sujet tabou et douloureux que l’on n’ose pas aborder, que l’on soit Malgache ou Français, on ne la trouve ni dans les livres scolaires, ni dans les conversations et encore moins dans les media. J’ai voulu donner à entendre le point de vue de ceux qui étaient présents au moment des faits, ceux qui ont pris le maquis, ceux qui ont résisté de long mois, ceux qui se sont battus pour la liberté, ceux qui étaient juste des enfants mais qui ont eu le temps de réfléchir depuis 71 ans. On ne peut pas « défaire » la rébellion et ses conséquences, mais ce film veut contribuer à transmettre la mémoire des anciens, le point de vue des malgaches sur cette lutte d’indépendance.

Ce film raconte un épisode méconnu de notre histoire. Il s’agit de l’histoire de Madagascar bien entendu mais elle concerne aussi la France et bien d’autres pays dans le monde : l’Allemagne, l’Angleterre, les pays d’Afrique de l’Ouest, d’Afrique du Nord et du Sud. Elle touche même l’Indochine et les États-Unis, car elle est liée à la seconde guerre mondiale...
Filmer des témoins est une expérience très différente de lire une histoire dans un livre ou d’en entendre parler. Quand on fait face à leur regard qui en dit long. Plus que les mots, l’image filmée enregistre et restitue quelque chose d’intangible, qui provoque l’émotion. Plus qu’une histoire, c’est une expérience : la rencontre avec les témoins. Écouter ce qu’ils ont à nous dire, et surtout ce qu’ils n’ont pas réussi à oublier. »

Marie-Clémence Andriamonta-Paes :

Née d’une mère malgache et d’un père français, elle a grandi à Madagascar. Après des études de sociologie à Nanterre et de marketing au CELSA-Sorbonne, elle crée en 1988 Laterit Productions avec Cesar Paes, société de production, de distribution et d’édition indépendante, qui vise à partager les cultures de Madagascar, du Brésil, d’Afrique et des îles. Fahavalo est le premier film que Marie-Clémence réalise en solo.

Cesar Paes

Documentariste brésilien né à Rio de Janeiro. Il signe l’image de ses propres films et en tant que chef opérateur il a travaillé avec Raoul Peck, Jean-Henri Meunier, Sandra Kogut…

Régis Gizavo

Né en 1959 dans le sud de Madagascar, ce musicien exceptionnel a réinventé l’usage de l’accordéon qui lui a valu un Prix découverte RFI en 1990. Il a accompagné Cesaria Evora, Christophe Maé et il avait même chanté avec i Muvrini. Régis a reçu une bourse SACEM / brouillon d’un rêve SCAM pour composer la musique originale de FAHAVALO.

Un avis :

"Leurs films laissent parler la poésie et font naître cette émotion qui procure de la joie et réveille les consciences. Marie-Clémence et Cesar Paes disent des choses engagées et sérieuses, mais ils le font en nous plaçant dans un état de rêve éveillé où il n’est pas essentiel de tout saisir d’un coup, puisque la présence des personnes, la couleur, le rythme et la pertinence de leurs discours vont rester en nous, puisque les traces du film font un travail en profondeur qui soudain nous interroge dans un sursaut sainement perturbateur. La démarche des Paes s’appuie sur le respect de l’autre ; le temps de son approche, de son écoute."
Martine Armand pour le Festival International de Fribourg.

Un écrivain, Raharimanana, témoigne

extrait de "Madagascar 1947"(Editions Vent d’ailleurs 2008)

"Trop loin, une île. Trop loin, une année, 1947. La terre rouge de l’île. Pour commencer, on dira que les faits ont réellement existé, que les sagaies ont volé, que les balles ont sifflé, que les cadavres ont jonché la terre. Rire. Des rires en masques de douleur. Des rires sur l’absurdité de ces lignes cherchant à comprendre pourquoi je devrais me justifier pour revendiquer ma mémoire. Trop loin mon île. Trop loin cette année, 1947...Ma mémoire demande des comptes à la "mère" patrie..."
A lire de toute urgence

Quelques repères :

1883/1885 : 1ère guerre malgache qui s’est soldée par une défaite française. Mais un traité inique oblige le gouvernement malgache de l’époque à emprunter auprès du Comptoir national d’escompte de Paris pour payer une indemnité de guerre de 10 millions de francs. Ce traité retirait à Madagascar le monopole du commerce et lui imposait de distribuer de vastes concessions à des étrangers.

1895 : Une seconde guerre franco-malgache permet aux troupes françaises d’entrer à Antananarivo, la capitale, le 27 novembre 1895. Et le 28 septembre 1896, le gouverneur général Gallieni condamne à l’exil la reine Ranavalona III et son premier ministre, avant de s’atteler à la «  pacification  » de l’île. Il décide le maintien de l’esclavage, la fermeture de toutes les écoles existantes, l’obligation pour les indigènes de parler le français

29 mars 1947 : début de l’insurrection sur la côte Est. Elle se poursuivra deux ans malgré une répression féroce : le bilan officiel est de 89 000 victimes (du côté des insurgés) mais il est sûrement bien supérieur et il y aura des exécutions jusqu’en 1953

26 juin 1960 : Madagascar accède à l’indépendance qui ne change pas grand-chose à la situation, la 1ère République malgache restant très étroitement liée à la France.

1971 : une nouvelle révolte fait 3000 victimes.

La situation aujourd’hui :

Madagascar est un des pays les plus pauvres du monde (le taux d’extrême pauvreté est de 76,2%). Un enfant de moins de 5 ans sur deux souffre d’un retard de croissance. 12 millions d’habitants n’ont pas accès à l’eau potable. Aux catastrophes naturelles s’ajoute le "cyclone" financier et un pillage des ressources naturelles par les concessions minières et les trafiquants de bois précieux. Les inégalités sociales sont en progression et la corruption prolifère dans tous les secteurs.