Avec : Philippe LABONNE, comédien, Jean-Gabriel PERIOT, cinéaste, Anne STEINER, historienne.
Avec le soutien du Théâtre EXPRESSION 7, de la DRAC du Limousin, du CONSEIL REGIONAL du Limousin, de la DDCSPP.
Tarif : 10 euros Réservation : 05 55 77 37 50
Trois voix pour une histoire sans mémoire
Philippe Labonne, comédien
En 1985, Philippe Labonne entre aux Ateliers du Théâtre Gérard Philipe de Saint-Denis dirigés par Daniel Mesguich et animés par Philippe Duclos.
De 1985 à 2005, il travaille en tant que comédien sous la direction de Daniel Mesguich , Michel Bruzat, Philippe Duclos, Max Eyrolle, Geneviève Schwoebel, Antoine Régent, Guy Lavigerie, Jean-Jacques Etcheverry, Daniel Ogier, Pascale Lemée, David Gauchard, Gérald Dumont.
Il fonde en 1988 sa compagnie : Le Théâtre en Diagonale pour lequel il a signé depuis de nombreuses mises en scène
Il lira des textes d’ Ulrike Meinhof, Franca Rame...
Jean-Gabriel Périot, cinéaste
Auteur de nombreux essais et poèmes visuels réalisés à base d’images d’archives et dont l’œuvre s’attache à explorer certains des sites les plus douloureux ou conflictuels de l’histoire collective. Ses films, par accumulation très rapide d’images photographiques, soumettent le spectateur à une forte tension visuelle et émotive. En 2008, il a réalisé un court métrage de fiction Entre chiens et loups. Mémoire à Vif a présenté l’une de ses réalisations, Eût-elle été criminelle, en 2008, au Théâtre Expression 7 lors d’une journée de réflexion sur les femmes tondues à la Libération.
Il présentera un travail en cours sur les images réalisées par Ulrike Meinhof et ses camarades.
Anne Steiner, historienne
Maître de conférence au département de sociologie de l’université de Nanterre. Elle a soutenu, en 1985, une thèse sur la violence révolutionnaire en Allemagne de l’Ouest et son livre RAF. Guérilla urbaine en Europe Occidentale , co-écrit avec Loïc Debray, est paru aux Editions de l’Echappée en 2006. Ses dernières recherches ont porté sur le mouvement anarchiste individualiste : Les En-Dehors. Anarchistes individualistes et illégalistes à la Belle Epoque .
Flash-back
1967 ! L’Europe assiste, indifférente, au génocide du peuple vietnamien. En Allemagne, ils sont quelques-uns déjà à refuser le silence complice, quelques-uns à dénoncer la torture et la terreur, quelques-uns déjà que l’on essaie de faire taire.
Dès lors, la violence va devenir pour chacun une arme...
A la violence de ces nouveaux guérilleros répond la violence de l’Etat. Chaque attentat secrète une répression plus violente. La répression. Partout. Dans les prisons. Mais aussi dans la rue. Chez toi. Dans ta tête... Traqué partout. Pour te désapprendre la révolte. Pour que le silence et l’ordre s’installent. A jamais.
L’Etat brandit l’épouvantail terroriste. L’Etat lance une gigantesque chasse à l’homme paramilitaire. L’Etat mène une nouvelle guerre. La guerre psychologique. Mensonges et diffamations déferlent sur les militants de la Fraction Armée Rouge.
La Presse se déchaîne. De tous côtés, cris de peur, cris de haine, cris de révolte. Les mots, les images, nous éclatent en pleine figure. Nous frappent en plein cœur.
Les mots terroristes nous violent chaque matin lorsque nous déployons notre quotidien. Mensonges. Diffamations. Où donc est la vérité ? Qu’y a t’il derrière ces images gorgées de violence et de sang qu’on nous oblige à consommer ? Où est la violence ? Du côté de ces femmes et de ces hommes qui luttent, là-bas, jusqu’à la mort ? Ou bien ici, du côté d’une presse vendue qui étouffe leurs cris avec le bâillon du scandale ?
Et si on essayait de traquer le silence ? Et si l’on essayait d’écouter leurs cris ? De comprendre leurs révoltes ? De revivre leur mort ?
Ulrike Meinhof (1934/1976)
Très tôt, elle s’engage dans les luttes pacifistes, antifascistes et tiers-mondistes.
Editorialiste du journal Konkret de 1959 à 1968, elle participe à de nombreuses actions contre l’intervention américaine au Vietnam. Dans ses articles, elle dénonce les conditions de vie des ouvriers, notamment immigrés, des jeunes « délinquants » enfermés dans des instituts spécialisés.
Face à la violence de la répression menée par l’Etat, Ulrike Meinhof se radicalise et crée, avec Andreas Baader et Gudrun Ensslin, la RAF (Fraction Armée Rouge) qui prône la guérilla urbaine.
Arrêtée le 15 juin 1972 à Hanovre, elle est soumise à des conditions d’incarcération très dures, placée au quartier spécial de la section silencieuse de Cologne-Ossendorf, spécialement aménagée pour être isolée acoustiquement (isolement total, cellule blanche et insonorisée, lumière électrique jour et nuit).
Le 9 mai 1976 au matin, Ulrike Meinhof est retrouvée pendue dans sa cellule. La version du suicide diffusée par les médias est immédiatement contestée par les avocats et les proches d’Ulrike.
Après la mort d’Ulrike Meinhof, l’essayiste Lothar Baier a écrit : « Je me suis parfois demandé ce qu’Ulrike Meinhof avait pu penser pendant ces quatre années de détention plutôt spéciale, en apprenant que le Général SS Karl Wolff, chef d’état-major de Himmler, avait été libéré après cinq ans de détention, alors qu’il avait été condamné pour participation aux meurtres de trois cent mille personnes. »
Je suis l’image que l’on me vole, image dérobée, dégradée, que l’on feuillette, que l’on arrache feuille à feuille, image que l’on ferme et referme, que l’on cadre et recadre sans cesse, image toujours la même, à laquelle vous me liez, me ligotez, dans laquelle vous êtes projetés, reclus, otages à ma place, otages de vous seuls, détenus dans l’étroit luxueux enclos de nos pensées uniformes, libres et ne pouvant cependant libérer nos envols entravés.
Marcel Hanoun Libertad
Non
S’ils vous disent
non
elle s’est suicidée
vous devez savoir
« j’ai encore tant à faire
je ne veux pas, je ne peux pas, je ne veux pas,
je ne peux pas mourir »
Non
Ulrike Meinhof
non
assassinée
dans l’Allemagne
qui protège le dollar et la lire
et sème encore l’acier, la mort
et la torture
aaah
Une femme
sans maison
sans enfants
sans mari
mais elle a le courage
dans ses mains
c’est une femme
sans gardiens
elle fait peur
et sa conscience
elle fait peur
pour penser
elle fait peur
ils veulent
elle fait peur
l’anéantir...
Ulrike Meinhof / Giovanna Marini
album : Correvano coi carri
traduction : Mariella Grillo