"La Makhnovtchina, une Révolution inconnue" 13 mai 16h EAGR 64 avenue de la Révolution
Article mis en ligne le 24 avril 2017
dernière modification le 5 mai 2017

par Webmestre

Entrée Libre

Débat avec Dominique Danthieux historien
Projection du film d’Hélène Chatelain : "Nestor Makhno, paysan d’Ukraine"

Une autre vision de la Révolution russe

« La Révolution inconnue », c’est le titre du livre de Voline -paru en France en 1947- lui-même acteur des Révolutions russes : la première, celle de 1905, la seconde, celle de 1917, et celle qu’il considère comme la troisième, niée, occultée par les Bolcheviks, de 1917 à 1921, révolution libertaire, moment où le peuple assume, sans l’Etat, les tâches d’organisation de la société avec la mise en place de syndicats, de coopératives, de communes, de soviets, selon une organisation horizontale, participative et libre. Ce mouvement révolutionnaire d’Ukraine-la Makhnovtchina-fut important par sa durée (1917-1921), sa dimension et la personnalité de Makhno dont les nombreux succès militaires face aux nationalistes et aux armées blanches lui valurent d’être courtisé par les Bolcheviks avant d’être trahi par eux. La légende construite par la propagande soviétique a fait de Makhno un anarchiste-bandit-antisémite contre-révolutionnaire.

De la même manière, l’insurrection des marins de Kronstadt en mars 1921, écrasée par l’Armée rouge de Trotsky-50 ans après la Commune de Paris-, sera calomniée pour empêcher la contagion, les mutins étant accusés de vouloir restaurer le pouvoir tsariste.

L’enterrement de Kropotkine le 13 février 1921, suivi par 20 000 Moscovites, sera la dernière manifestation de masse sous un gouvernement bolchevique. Kropotkine avait demandé que ne soit pas chantée L’Internationale, tant elle ressemblait déjà « à des hurlements de chiens faméliques ». Dès le mois de mars, toutes les organisations anarchistes sont interdites, leurs militants persécutés. La Makhnovtchina est écrasée et Makhno rejoint la France où il mourra en 1934.

« La morale selon moi est que les révolutions n’engendrent une amélioration radicale que si les masses sont vigilantes et savent comment virer leurs chefs dès que ceux-ci ont fait leur boulot » Orwell 1946

Nestor Makhno, paysan d’Ukraine
Un film d’Hélène Chatelain
France 1996 documentaire 58 mn
« Makhno, un drapeau noir qui dérange l’Histoire »

« Makhno est-il la mémoire inconnue et méconnue de l’Ukraine ? Pourquoi cette manipulation de l’histoire ? Quels sont les moyens qui ont imposé la remise en forme de l’histoire par les autorités soviétiques et cette occultation du mouvement anarchiste d’Ukraine ? Sa mémoire est-elle vivante aujourd’hui en Ukraine après des années d’occultation totale soviétique ? Ce film est-il une manière de restituer la mémoire de Nestor Makhno et de sa lutte, si longtemps éradiquée ? Une réhabilitation de l’auteur de « Prolétaires de tous les pays, regardez au fond de votre âme, c’est là qu’est la vérité » ?
Le film d’Hélène Chatelain est une véritable enquête sur la mémoire, un travail d’investigation sur la manipulation de l’image et ses conséquences. Une heure dense d’informations, d’émotions, de témoignages, d’analyses comparatives des images positives et négatives… » (Christiane Passevant)

Makhno vu par Hélène Chatelain

(Chroniques Rebelles juin 2008)

« Makhno est un homme parmi d’autres, mais il se trouve qu’il avait une énergie démesurée et qu’il a eu cette confiance donnée parce que maquisard et résistant. Une résistance menée seul qui a signifié presqu’un an de prise de parole continuelle et de réflexion continuelle entre eux. Et cela peu ont eu la chance d’avoir cette expérience. Cette réflexion sur pourquoi le mouvement libertaire a disparu au profit du modèle bolchevique. Était-il plus adapté aux questions posées à l’époque par presque tout le monde ? Le mouvement libertaire qui ne posait effectivement pas le problème du pouvoir s’était dégagé de cette question. Makhno ne parle pas de bonheur, mais dit : « Créer une société qui ne soit pas d’humiliation, une société de responsabilités, où la liberté de chacun serait la responsabilité de tous. » Ce n’est donc pas quelque chose à conquérir, c’est un tissu de relations sociales où ensuite le politique se mettra. Et cela, je l’ai rarement vu dans le feu de l’action. Cette réflexion prenait place en pleine action, pendant la guerre civile, pendant quatre années hallucinantes…

Certains textes disent qu’il a toujours été question de prendre d’abord le pouvoir et que l’on verrait après, mais on peut penser la chose autrement. Et c’est vraiment actuel quand on constate la débâcle des partis. Et se remettre à l’écoute de cette émergence de pensée, profondément possibiliste, qui n’est pas une pensée déterministe. La guerre civile, c’est une guerre civile de mots passée et qui continue. »
« La liberté ne peut passer par la soumission du peuple »

Hélène Chatelain

Issue de l’immigration russe « non somptueuse », elle a d’abord été comédienne au théâtre sous la direction de Jean-Marie Serreau, Roger Planchon, Georges Wilson et Armand Gatti dont elle partagera la vie. Elle a prêté son visage à l’un des courts-métrages les plus fabuleux de l’Histoire du cinéma, « La Jetée » de Chris Marker. En 1968, elle cherche une autre voie et ses projets cinématographiques se confondent, au début, avec ceux de Gatti. Ses films plus personnels, peu connus du grand public, soulèvent le problème des systèmes politiques et des individus qui refusent de s’y plier.
Elle a aussi permis de faire connaître des auteurs méconnus et des manuscrits de dissidents russes qui circulaient, dans les années 60, sous le manteau, dans le bloc communiste, tel « Récits de la Kolyma » de Chalamov.

MAKHNOVTCHINA

Par les monts et par les plaines
Dans la neige et dans le vent
A travers toute l’Ukraine se levaient nos partisans
A travers toute l’Ukraine se levaient nos partisans

Au printemps, les traités de Lénine
Ont livré l’Ukraine aux Allemands
A l’automne la Makhnovtchina les avait jetés au vent
A l’automne la Makhnovtchina les avait jetés au vent

Makhnovtchina, Makhnovtchina
Tes drapeaux sont noirs dans le vent
Ils sont noirs de notre peine, ils sont rouges de notre sang
Ils sont noirs de notre peine, ils sont rouges de notre sang

L’armée blanche de Dénikine
est entrée en Ukraine en chantant
Mais bientôt la Makhnovtchina l’a dispersée dans le vent
Mais bientôt la Makhnovtchina l’a dispersée dans le vent

Makhnovtchina, Makhnovtchina
Armée noire de nos partisans
Qui combattaient en Ukraine contre les rouges et les blancs
Qui combattaient en Ukraine contre les rouges et les blancs

Makhnovtchina, Makhnovtchina
Armée noire de nos partisans
Qui voulaient chasser d’Ukraine à jamais tous les tyrans
Qui voulaient chasser d’Ukraine à jamais tous les tyrans

Makhnovtchina, Makhnovtchina
Tes drapeaux sont noirs dans le vent
Ils sont noirs de notre peine, ils sont rouges de notre sang
Ils sont noirs de notre peine, ils sont rouges de notre sang